Je suis un ancien fumeur. J'ai fumé des P4, des Gauloises, des Gitanes, des Boyards, des Camel (on disait qu'elles contenaient une quantité infinitésimale d'opium), des Flints, des Kent, des Peter, des Royale (bien avant Ségolène), des Marlboro, le cigare, la pipe, sans parler d'un tas d'autres choses moins avouables auxquelles, n'ayant pas l'intention de me présenter à l'élection présidentielle, je peux me permettre de faire une fine allusion. J'avais 16 ans en 1976, c'est ma seule excuse.
Tout ça pour dire qu'on ne fume pas pour le plaisir. C'est du boulot, ça coûte une fortune, et, pour finir on attrape le cancer. Tous les fumeurs le savent, ils n'ont pas attendu que ce soit marqué en corps 40 sur les paquets. Aussi, devant cette belle unanimité anti-clope, je voudrais dédier cette chronique au petit peuple des fumeurs frigorifiés qui se pressent en grelottant sur le perron, gelés, mais surtout humiliés jusqu'aux os par le consensus rassurant et autosatisfait qui se fait sur leur dos et qui, après les avoir poussés au vice à grands coups de stéréotypes culturels (has been), les met à la rue à l'aide d'autres stéréotypes culturels (dans le coup). Déjà, certaines images nous paraissent étranges, de cette étrangeté créée par les bons films de science-fiction : tel le plateau de « Droit de réponse » embrumé par les épaisses volutes de tabac et où l'on se balançait... des cendriers à travers la figure. Pas des masses de p-dg en train de fumer des Cohiba Panatelas sur ce perron, pourtant. Leurs lieux publics à eux doivent être suffisamment privés pour les mettre à l'abri de ce premier devoir du manager : l'exemplarité. L'innovation, le service client, l'excellence, grands classiques des Chartes de Valeurs, ce sont des mots-valises à encadrer au mur de l'entreprise, aussi fades que des lithos de chaînes hôtelières. Mais l'exemplarité nous empoigne au c½ur de notre vraie vie à nous et nous pose directement la question de savoir si nous sommes prêts à payer (un peu) de notre personne. L'exemplarité et la confiance sont les vertèbres fragiles de toutes les cultures d'entreprise coincées. Fragiles et coincées, parce que dans le dos de l'entreprise, équivalentes des cervicales : c'est sur elles que repose la tête. La réponse, bien souvent, est d'esquiver la question gênante (faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais) en l'« outsourçant », en la sous-traitant à des catégories bien identifiées, par exemple ces cochons de fumeurs : dehors les drogués ! Les diverses fatwas anti-tabac nous proposent donc de faire la confortable expérience de la normalité et de l'exclusion bienveillante des communautés qui ne correspondent pas à notre cahier des charges. Voilà comment « on » façonne nos vies. Mais attention, les prochains sur la liste, ce sont les gros, puis les pauvres, puis les plus de 50 ans (les gros fumeurs pauvres de plus de 50 ans sont mal barrés !)... et puis un beau jour, vous réaliserez que les gens vous regardent d'une façon bizarre et vous saurez qu'il est trop tard, que votre tour est venu !
x-Shaynee, Posté le samedi 22 novembre 2008 12:27
Salut.
Je viens de changer de blog, j'ai donc un nouvel univers à te faire découvrir... J'espère te voir bientôt =]
Comme sur l'ancien les coms sont rendu et les amis accepter. Cependant je ne valide aucun chiffre.
Bonne journée à toi.